Des lutteurs, ces professionnels du tapochage en speedo, qui viennent jusque sur notre lointaine île glacée nous divertir en plein morne janvier? Confirmation auprès de Félicie Wingerter, gestionnaire de la programmation du Franco-Centre d’Iqaluit, ce sont bien onze lutteurs, un arbitre et un annonceur de la fédération de lutte de Québec, North Shore Pro Wrestling (NSPW) qui sont attendus.
À l’impossible, nul n’est tenu, pourtant, ce gala a bel et bien eu lieu, malgré l’immensité du défi. Cette idée de Mme Wingerter s’inscrit bien dans la tendance récente du Franco-Centre à proposer de l’inédit, mais elle a pris de court jusqu’au président de la NSPW, Steve Boutet, qui a d’abord cru à une blague…
En entrevue, Monsieur Boutet raconte qu’à chaque fois qu’il amenait un problème, une solution était trouvée. Le ring, le logement, le transport, la location de l’événement, petit à petit, il fut convaincu du sérieux de la gestionnaire et un contrat fut conclu.
Lui-même organisateur de galas, il en tient plus de 80 par an, il lui restait à trouver ses participants. Il compte sur une banque des meilleurs lutteurs du Québec, en plus des 52 élèves de son école de lutte. Sans préciser où l’événement se tiendrait, il a demandé à ses lutteurs de donner leurs disponibilités. Les onze premiers qui obtiendront congé de leur employeur pourront se joindre au voyage.
C’est seulement lorsque le onzième a confirmé sa présence qu’ils ont tous appris avec joie qu’ils iraient se promener dans le Grand Nord. Plusieurs autres furent déçus de manquer pareille occasion, ils auraient peut-être poussé un peu plus pour un congé.
C’est que la NSPW, meilleure fédération de lutte du Québec depuis 12 ans, ne sort pas souvent de sa province…
Une première pour plusieurs
C’est le 3 février dernier qu’a eu lieu l’événement. Tant de questions tarabustaient les spectateurs rencontrés quelques minutes avant la cloche du premier combat. Est-ce que ce sont des débutants ou des « vrais »? Comment participer à un tel spectacle? Pour plusieurs, c’était une première.
Vrai, tout le monde est bien conscient de nos jours qu’il s’agit d’un type de théâtre athlétique scripté, des cascadeurs-acteurs en somme, mais les protagonistes se nourrissent surtout de la foule.
La qualité du spectacle dépend aussi de la qualité du public. Celui d’Iqaluit n’a pas déçu malgré son inexpérience. Un petit cours rapide, gracieuseté de l’animateur-maison, a suffi. Les bons furent acclamés, les méchant hués et le spectacle en fut tout un.
Dès les premières prises, les spectateurs ont lâché leur fou à l’unisson, tout le monde avait maintenant 14 ans et la magie opéra. Cinq combats, dont une pièce de résistance à trois lutteurs, remportée par l’aérien Double-D, personne n’a demandé de remboursement.
Nous étions hilares, épatés et fortement impressionnés par la suite ininterrompu de cascades, de flexions de biceps et de costumes délirants. Et que dire de l’accessibilité des lutteurs qui nous ont gracié de leurs temps, posant pour des photos, signant des autographes ou discutant de leur passion? Nonobstant les personnages brutaux, nous sommes bien en présence de chics types. Ils étaient d’ailleurs unanimes, il faut que ça devienne un classique annuel!
Et pour répondre à la question : « Est-ce que ce sont des vrais lutteurs? » Impossible de fausser le bruit des atémis et des corps qui se font écraser par un saut de la troisième corde. Ces athlètes souffrent pour notre plaisir… Et le leur!