le Dimanche 13 juillet 2025

Des centaines de leaders, experts, membres de la communauté et jeunes étaient réunis à l’hôtel Aqsarniit à l’occasion de l’événement annuel afin d’explorer et de définir une vision unifiée de la souveraineté du Nunavut dans l’Arctique ancrée dans les valeurs, les priorités et les réalités vécues par les Nunavummiut.

Alors que les discussions de la première journée se sont concentrées sur des thèmes tels que l’autodétermination et l’adaptation au climat, ce sont les besoins concernant les infrastructures sur le territoire qui ont retenu l’attention le lendemain. 

Pour le premier ministre du Nunavut, P.J. Akeeagok, la souveraineté et la sécurité dans l’Arctique ne peuvent être atteintes sans reconnaître les Inuit comme des partenaires à part entière et égaux dans la prise de décisions, le développement et la défense.

Des discours rassembleurs

Lors du discours d’ouverture, Jeremy Tunraluk, président de Nunavut Tunngavik Inc. à plaidé pour un meilleur investissement dans les communautés notamment en termes de routes, de communications, de pistes d’atterrissage et de logements.

« Que ce rassemblement en soit un d’actions, pas seulement de paroles. Engageons-nous à construire des maisons, à protéger notre langue et nos eaux et à donner à nos jeunes les moyens d’agir pour les Inuit, par les Inuit, au Nunavut, pour toujours. »

 

— Jeremy Tunraluk, président NTI

Le lendemain, c’était au tour de P.J. Akeeagok de débuter la journée : « Alors que d’autres regardent l’Arctique et voient un potentiel inexploité ou un levier géopolitique, nous voyons autre chose : un chez-soi… » puis d’ajouter :

« Aujourd’hui, nous ne sommes pas des témoins passifs de la politique arctique : nous en sommes les architectes. »

— P.J. Akeeagok, premier ministre du Nunavut

Des menaces sans précédent

Le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS), qui avait des délégués présents au sommet, déclare que les gouvernements territoriaux et provinciaux, les administrations locales, ainsi que les organisations autochtones du Nord canadien, sont confrontés à un contexte de menaces d’une une ampleur sans précédent.

Magali Hébert des relations avec les médias pour le SCRS explique que celles-ci découlent non seulement des capacités militaires des concurrents stratégiques et des effets des changements climatiques, mais aussi, de plus en plus, de l’espionnage, d’activités d’ingérence étrangère et d’interventions économiques illicites.

Les réserves non exploitées d’hydrocarbures, les stocks de pêche, les financements et collaborations dans le domaine de la recherche dans l’Arctique et le Nord canadien et les nouvelles technologies maritimes et sous-marines attirent selon elle les investissements étrangers, ce qui pourrait menacer les intérêts régionaux.

Outre la préoccupation militaire historique que constitue la Russie pour l’Arctique, elle mentionne l’attention accrue de la République populaire de Chine qui s’est déclarée « grande puissance polaire ».

Stephen Harper, qui était présent pour une discussion informelle avec Udlariak Hanson, vice-présidente de la société minière Baffinland, croit que ces menaces représentent une occasion de faire prospérer la région.

L’ancien premier ministre du Canada de 2006 à 2015 y est allé d’une déclaration marquante en qualifiant la croissance de l’Arctique canadien d’« épouvantable ».

Il a énoncé que par rapport à la plupart des autres pays de l’Arctique, le Canada propose un bilan lamentable en matière de développement des infrastructures et estime que la meilleure façon d’améliorer cette lacune est de dépenser de l’argent dans le domaine militaire.

« C’est le moyen le plus important et le plus efficace de créer l’infrastructure la plus fondamentale et le plus vaste ».

— Stephen Harper, ancien premier ministre du Canada

L’ancien premier ministre du Canada Stephen Harper a qualifié le développement de l’Arctique canadien d’« épouvantable ».

Source : Facebook P.J. Akeeagok

P.J. Akeeagok est d’avis que quatre projets d’infrastructure d’édification du pays dirigés par des Inuit doivent présentement être traités en tant que priorités nationales pressantes, et non comme des aspirations futures. « Ces projets permettront non seulement de répondre aux besoins urgents des collectivités, mais aussi d’accroître la souveraineté du Canada dans l’Arctique ».

Il s’agit du port en eau profonde de Qikiqtarjuaq, du projet hydroélectrique d’Iqaluit, de la liaison hydroélectrique et fibre optique de Kivalliq ainsi que la route et le port de Grays Bay.

Le changement climatique fragilise l’Arctique

Un thème majeur qui a émergé du Sommet est l’adaptation au changement climatique et les impacts environnementaux.

Magali Hébert déclare que la fonte des glaces entraînera probablement une présence accrue d’acteurs arctiques et non arctiques dans les régions nordiques, puisqu’elle ouvrira la voie à l’utilisation d’autres routes de navigation intéressantes et à l’exploitation de gisements de minéraux.

« Le dégel du pergélisol pourrait menacer l’intégrité des infrastructures en place et poser des défis pour la construction de nouvelles structures ».

Pour faire face au phénomène, P.J. Akeeagok demande notamment la poursuite et l’augmentation des investissements dans la gérance de l’environnement conduite par les Inuit, un soutien urgent aux transitions vers l’énergie propre ainsi que des infrastructures résilientes aux impacts climatiques qui permettent aux Inuit de rester sur le territoire de manière durable.

« Protéger l’Arctique, c’est donner du pouvoir aux gens qui y vivent. L’action climatique doit être axée sur la communauté, ancrée dans la culture et enracinée en partenariat avec les dirigeants du Nunavut ».

La Division de la consommation du ministère des Services communautaires a récemment souhaité rappeler aux Nunavummiut qu’il faut toujours faire preuve de vigilance face aux offres en ligne.

Selon les données du Centre antifraude du Canada, entre le 1er janvier 2025 et le 31 mars 2025, 9092 victimes de fraude avaient été répertoriées au pays pour des pertes financières totales évaluées à 165 millions de dollars.

La QIA s’en tire sans trop de dommages

Au cours de l’année 2024, la Gendarmerie royale du Canada (GRC) au Nunavut rapporte avoir reçu cinq plaintes pour fraude en ligne. Le sergent George Henrie, attitré aux médias et à la police communautaire, indique que ce ne sont cependant pas tous les cas qui ont mené à une perte de liquidités.

L’un des signalements concerne une personne ayant déclaré avoir fait des gains sur un site de jeu en ligne, mais ne les avoir jamais obtenus, car son compte avait été piraté et les fonds avaient été redirigés ailleurs.

Deux plaintes provenaient de Nunavummiut affirmant que quelqu’un se faisait passer pour eux sur les réseaux sociaux dans le but de demander de l’argent.

Les dernières situations se rapportent à des organisations non gouvernementales (ONG) qui ont été fraudées pour une somme totale d’environ 5 millions de dollars par des escroqueries par hameçonnage.

Dans un communiqué de la GRC publié le 23 mai 2025, on apprend que la Section des enquêtes générales (SEG) de la GRC d’Iqaluit a posé des accusations dans l’un des deux dossiers pour des faits qui remontent à novembre 2024.

Chukwuma Eruchalu, un homme de 23 ans a été arrêté à Winnipeg et est poursuivi pour avoir fraudé la QIA pour plus de 2 millions de dollars à la suite d’une compromission de courrier électronique commercial.

« La compromission de courrier électronique professionnel est une arnaque sophistiquée dans laquelle un individu compromet des comptes de courrier électronique professionnels légitimes par le biais de l’ingénierie sociale ou d’une intrusion informatique pour effectuer des transferts de fonds non autorisés », peut-on lire dans le message de la GRC.

À ce jour, la QIA déclare avoir récupéré 2,1 millions de dollars des 2,2 millions de dollars perdus et s’efforce de recouvrer la somme restante.

« Bien que les systèmes de la QIA n’aient pas été compromis, nous continuons néanmoins à mettre à jour nos processus internes et externes actuels pour éviter de futures tentatives de fraude.  QIA prend actuellement des mesures actives pour s’assurer que le personnel est formé et informé sur la cybercriminalité et les moyens de se protéger contre les attaques »

— QIA, par voie de communiqué

Le 19 juin dernier, la GRC d’Iqaluit informait cette fois-ci avoir reçu de nombreux signalements faisant état d’une escroquerie qui circule partout sur le territoire.

L’arnaque concerne la page Facebook « Sell and Swap » où une personne annonce vendre de la nourriture traditionnelle. Une fois les fonds recueillis, l’escroc ne fournit pas la marchandise promise et bloque les interactions avec l’acheteur.

Marju Onalik est l’une des victimes récentes de ce stratège. Ne souhaitant pas dévoiler le montant perdu, la résidente d’Iqaluit s’attendait à recevoir de la viande de caribou et de béluga à la suite de sa transaction. « Il y a très peu de chances de récupérer mon argent et c’est terrible ! »

Contacté afin de savoir s’il avait lui-même été victime de fraude, le gouvernement territorial déclare ne pas être à l’abri de ces attaques :

« Le gouvernement du Nunavut se défend quotidiennement contre la cybercriminalité et les activités frauduleuses au moyen de mesures préventives, notamment la formation du personnel et un accent continu sur le renforcement des contrôles internes. »

Quelques conseils pour éviter les pièges

Pour se protéger contre la fraude, le ministère des Services communautaires recommande de toujours vérifier l’identité d’un vendeur en ligne et de ne jamais répondre à une communication qui semble louche.

L’utilisation de l’identification à deux facteurs pour ouvrir une session dans le portail d’une institution financière ainsi que la modification fréquente des mots de passe constituent aussi de bonnes habitudes à prendre. 

À ces conseils, la GRC d’Iqaluit ajoute qu’en aucun cas, une personne ne devrait procéder à un virement électronique avant de récupérer les articles achetés ; marchandise qui se doit par ailleurs d’être recueillie dans un endroit public. 

Il est également suggéré de se méfier des soldes qui semblent « trop beaux pour être vrais ».

Enfin, il ne faut jamais partager des informations personnelles telles qu’une date de naissance ou des données bancaires.

Si vous êtes victime d’une fraude, communiquez avec la GRC d’Iqaluit au 867-979-0123 et avec le Centre antifraude du Canada au 1-888-495-8501.

Financé par Emploi et Développement social Canada (EDSC), ce programme vise à offrir des emplois estivaux aux jeunes de 15 à 30 ans qui peuvent avoir du mal à trouver un travail, notamment les personnes de la nation inuit et des collectivités éloignées. 

L’initiative prévoit des subventions salariales pour les employeurs d’organismes sans but lucratif et du secteur public, de même que pour les organisations privées comptant 50 employés à temps plein ou moins. 

Samuelle Carbonneau du Bureau des relations avec les médias pour EDSC souligne que pour certains, Emplois d’été Canada représente une première expérience sur le marché du travail qui les guide vers une formation, des études futures ou vers un choix de carrière.

Une situation gagnant-gagnant          

Du 19 novembre 2024 au 19 décembre 2024, les employeurs au Nunavut et partout au Canada ont été invités à présenter une demande de financement afin de créer des occasions d’emploi estival.

« Les organismes à but non lucratif peuvent recevoir une contribution pouvant aller jusqu’à 100 % du salaire horaire minimum adulte en vigueur dans la province ou le territoire et toutes les charges sociales obligatoires liées à l’emploi (CSE) qui y sont associés. Les employeurs des secteurs public et privé sont admissibles à une contribution pouvant atteindre jusqu’à 50 % du salaire horaire minimum en vigueur dans la province ou le territoire », peut-on lire dans le Guide du demandeur Empois d’été Canada 2025.

Les offres proposées doivent être à temps plein, pour une durée de six à seize semaines. « Toutefois, certains employeurs ont l’intention de garder les jeunes comme employés après la fin du placement », souligne Samuelle Carbonneau.

Une évaluation de 2024 d’Emplois d’été Canada révèle que les personnes qui occupent un poste offert dans le cadre du programme ont des résultats supérieurs sur le plan de l’emploi, dépendent moins de l’aide au revenu et ont de meilleures perspectives à long terme sur le marché du travail.

Toujours selon la porte-parole d’EDSC, les employeurs ressortent également gagnants grâce à un bassin de jeunes travailleurs motivés qui ont de nouvelles idées et perspectives.

« Les jeunes s’adaptent souvent rapidement au changement. Investir dans les jeunes travailleurs peut entraîner une loyauté à long terme dont bénéficiera l’organisme au bout du compte. »

— Samuelle Carbonneau, porte-parole EDSC

Cette année marque la première fois qu’une demande est acceptée au Nunavut pour la Fondation GLOCAL du Canada, une organisation qui vise à créer une société plus informée, engagée et inclusive en renforçant la résilience des jeunes et en luttant contre la désinformation.

La Fondation qui est à la recherche de cinq agents de développement communautaire estime qu’au-delà d’une subvention salariale, ce programme représente une occasion unique de mettre en relation les jeunes Canadiens avec des rôles porteurs dans l’amélioration des conditions de vie d’une communauté, la sensibilisation politique et le service public.

Jia Yue He, directrice de recherche à la Fondation GLOCAL du Canada est d’avis que l’embauche de personnes âgés de 15 à 30 ans présente de nombreux avantages.

« Nous considérons les jeunes non seulement comme les leaders de demain, mais aussi comme des acteurs clés de l’innovation civique d’aujourd’hui. Ils apportent un regard neuf, une grande aisance numérique et un lien étroit avec leurs communautés locales ».

— Jia Yue He, directrice de recherche Fondation GLOCAL

Les emplois offerts aux Nunavummiut comprennent notamment des manœuvres pour la municipalité de Baker Lake, des guides de plein air à Resolute ainsi que des charpentiers et des spécialistes en médias sociaux à Iqaluit.

Malgré les avantages que génère la participation au programme Emplois d’été Canada, EDSC souligne que le nombre de demandes d’employeurs du Nunavut demeure faible comparativement aux autres régions du pays.

Des obstacles à franchir

Jia Yue He souligne qu’à l’instar de nombreuses organisations à but non lucratif opérant dans des régions éloignées ou mal desservies, le défi de leur organisation ne réside pas dans un manque d’intérêt des jeunes Nunavummiut, mais bien au niveau de la stabilité du financement. La Fondation travaille d’ailleurs actuellement à créer des partenariats avec des institutions territoriales et fédérales pour renforcer leur impact au Nunavut.

« Cela dit, nous sommes fiers que bon nombre de jeunes restent engagés après leur contrat. Certains deviennent mentors, d’autres leaders régionaux ou employés à temps plein ».

Samuelle Carbonneau croit pour sa part que les jeunes des communautés éloignées sont confrontés à des défis uniques dans leur recherche d’emploi. « Les transports limités font en sorte qu’il est difficile de se rendre jusqu’à l’emploi disponible. En outre, il y a moins d’occasions d’emploi et de soutien à la formation, ce qui s’ajoute à cette difficulté. Pour bien des jeunes des régions éloignées, un accès limité à Internet réduit encore davantage l’accès à l’information concernant les emplois disponibles ».

Des données fournies par Statistique Canada indiquent que le taux de chômage chez les jeunes âgés de 15 à 24 ans au Nunavut était de 16,4 % en 2024 alors que la moyenne canadienne se situait à 14,5 % pour la même période.

Lancée en 2022, la série sur les leaders autochtones de Postes Canada souligne l’implication d’Inuit, de Métis et de membres des Premières Nations qui ont consacré leur vie à préserver leur culture et à améliorer le niveau de bien-être des peuples autochtones à travers le pays.  

Le timbre à l’effigie de Julia Haogak Ogina présente une photo de la femme prise en 2021 alors qu’elle se trouvait au festival Qaggiq d’Iqaluit en tenue de danse du tambour.

Faire briller une pratique traditionnelle

Lisa Liu des relations avec les médias pour Postes Canada indique que chaque année, la société d’État reçoit des dizaines d’idées de timbres de la population canadienne. Dans le cas d’Ogina, c’est l’organisation Inuit Tapiriit Kanatami (ITK) qui a soumis cette candidature.

Toutes ces suggestions sont présentées au Comité consultatif sur les timbres-poste, qui regroupe des personnes indépendantes expertes dans leur domaine.

« Postes Canada déploie un maximum d’efforts pour maintenir un équilibre entre les différentes régions et cultures en choisissant des sujets et des motifs qui illustrent fidèlement la diversité du Canada ».

— Lisa Liu, relations avec les médias - Postes Canada

Reconnue pour son implication dans la protection et la promotion de la culture et des langues de ses ancêtres ainsi que pour sa contribution à un projet pour trouver des chansons de danse du tambour oubliées, Ogina exprime avoir d’abord été incrédule face à cette annonce. Elle affirme qu’elle croyait que cette reconnaissance était plutôt destinée à des personnes plus âgées ou encore, décédées.

Ayant grandi au rythme des tambours, l’honorée estime que cette pratique traditionnelle représente avant tout une célébration et une façon d’exprimer les expériences vécues par les Inuit. « Les danses du tambour ont une grande importance culturelle. Elles offrent un espace de rassemblement communautaire, d’expression spirituelle et de transmission du savoir ancestral ».

Le 13 juin dernier à Ulukhaktok aux Territoires du Nord-Ouest, une cérémonie a eu lieu pour le dévoilement officiel du timbre. 

« L’événement s’est déroulé dans ma ville natale avec ma famille tout autour de moi, car c’est là que j’ai d’abord appris ce que je sais de mes racines culturelles et de la façon dont les Inuit se sont connectés à la terre, aux animaux et à l’environnement »

— Julia Haogak Ogina

Pour sa famille ce n’est pas la première fois que l’un de ses membres est mis en lumière par Postes Canada. En 1979, une œuvre d’Helen Kalvak, l’arrière-grand-mère de Julia, a été représentée sur un timbre intitulé « The Dance ». 

Le timbre-poste met à l’honneur Julia Haogak Ogina alors qu’elle se trouvait au festival Qaggiq d’Iqaluit en tenue de danse du tambour.

Une richesse pour la région

Agissant à titre de gestionnaire linguistique pour la Kitikmeot Inuit Association (KIA), Ogina participe à la création d’un cadre linguistique régional et de programmes favorisant l’apprentissage oral et le transfert des connaissances.

Contactée pour commenter la nouvelle, la KIA se dit extrêmement fière que l’une des leurs ait été choisie pour être honorée par Postes Canada : « Julia mérite cette prestigieuse reconnaissance pour toutes ses réalisations et ses efforts visant à préserver, protéger et promouvoir la langue et la culture inuit. Nous sommes fiers de ses accomplissements, tant personnels que dans le cadre de son rôle à la KIA ».

« Sa présence, son dévouement et son expérience nous rendent encore plus efficaces pour soutenir le bien-être et le développement culturel de la communauté inuit de Kitikmeot »

— Kitikmeot Inuit Association

De façon hebdomadaire depuis deux ans, Ogina dirige des danses du tambour avec son mari. Par ses enseignements, elle souhaite ainsi passer peu à peu le flambeau. « C’est en préparant la prochaine génération que nous gardons la langue vivante ».  

Débuté en septembre 2020, l’agrandissement du Centre du patrimoine Nattilik est arrivé à son terme. Financé à hauteur de près de 8 millions par Parcs canada sur un montant total d’un peu plus de 15,5 millions, le bâtiment permet maintenant aux visiteurs de profiter d’une exposition de classe mondiale. De nombreuses pièces provenant des épaves HMS Erebus et du HMS Terror, navires ayant pris part à l’expédition menée par sir John Franklin en 1845 pour chercher un passage au Nord-Ouest, permettent désormais aux visiteurs de se plonger dans l’univers de l’explorateur.

La cérémonie d’ouverture a eu lieu le 4 juin dernier, en présence de dignitaires, de jeunes, d’aînés et de leaders de la communauté ainsi que le président et directeur général de Parcs Canada, Ron Hallman.

Dans les traces de l’expédition Franklin

Aux dires de Campbell Cameron qui a agi à titre de chef de projet pour l’agrandissement du centre, tous sont époustouflés par l’espace supplémentaire du lieu et l’opportunité d’accueillir davantage d’événements culturels et de transmettre le savoir inuit. 

« L’exposition “Percer les glaces” illustre les expériences partagées entre les Nattilingmiut et les membres de l’expédition Franklin de 1845 dans l’Arctique du 19e siècle, donnant un aperçu de l’endurance, de la ténacité et de l’ingéniosité requises dans cet environnement exceptionnel. »

— Teevi Mackay, agente des relations publiques et des communications pour Parcs Canada

Les visiteurs peuvent se plonger dans l’univers de Franklin en observant 59 artefacts originaux, dont certains des plus importants provenant du HMS Erebus. Parmi ces pièces se retrouve une règle parallèle marquée « Fred Hornby », second sur le HMS Terror, un timbre avec l’inscription « Ed. Hoar », intendant du capitaine ainsi qu’un service de vaisselle probablement utilisé à la table de Franklin.

L’exposition présente aussi des reproductions d’artefacts restitués au Royaume-Uni, tels que la cloche du navire.

Teevi Mackay estime que la préservation de ces articles au Nunavut va au-delà de la protection des objets physiques.

« Cela signifie également honorer et maintenir la propriété inuit, tant matérielle que culturelle, de leur histoire et de leurs terres ».

La cérémonie d’inauguration a débuté avec la coupe officielle du ruban.

Crédit : Andrew Maher

Un lieu de rassemblement

Le bâtiment abrite maintenant une aire polyvalente et de présentation, offrant un emplacement à la communauté, à la Nattilik Heritage Society, à Parcs Canada et à d’autres intervenants pour organiser des événements culturels, des séminaires et des expériences d’apprentissage pour les étudiants. Un espace extérieur donne aussi la possibilité de montrer des expositions en plein air.

Teevi Mackay souligne que la proposition d’un lieu de rassemblement et d’un endroit éducatif pour Gjoa Haven et la région élargie de Kitikmeot constitue un élément clé du projet.

La Pitquhirnikkut Ilihautiniq/Kitikmeot Heritage Society a pour mission de préserver, promouvoir et enseigner la langue et la culture inuinnaqtun. Depuis quelques années, l’organisation collabore avec le Centre Nattilik et poursuivra de le faire en étendant son soutien aux formations et ateliers.

La directrice générale, Emily Angulalik pose un regard favorable sur l’agrandissement de ce lieu historique. « Grâce aux programmes culturels dirigés par le centre du patrimoine, nous améliorerons certainement l’identité inuinnait » .

Le projet a aussi contribué à l’ajout d’autres éléments tels qu’une salle de formation artistique qui permet aux membres de la communauté de réaliser leurs œuvres et de partager leurs compétences, une pièce insonorisée où les aînés peuvent consigner leurs histoires orales, deux espaces de bureaux et une boutique de cadeaux offrant un choix plus varié.

Dans les trois territoires canadiens, et de façon similaire, les communautés francophones sont en pleine croissance et évoluent au fil des arrivées de francophones et de leurs familles venant d’horizons variés comme l’Afrique, l’Europe ou encore l’est du Canada. Non seulement les communautés du Nord se diversifient, mais elles n’en demeurent pas moins dynamiques, tenaces et investies.

Pour Audrey Fournier, directrice générale de la Fédération franco-ténoise (FFT), la communauté francophone des Territoires du Nord-Ouest est mobilisée, engagée et dynamique. « Notre communauté était engagée dans le passé et elle l’est encore aujourd’hui pour faire valoir ses droits », explique-t-elle.

Les grands mouvements de mobilisation des années 2000 et plus récemment en 2019 et 2025 pour obtenir le droit de recevoir une éducation en français, sont des exemples de la combattivité des Franco-Ténois lorsqu’il est question d’éducation. Ces actions citoyennes ont apporté beaucoup d’acquis aujourd’hui, pense Mme Fournier.

« Notre communauté était engagée dans le passé et elle l’est encore aujourd’hui pour faire valoir ses droits » – Audrey Fournier, directrice générale de la Fédération franco-ténoise.

Crédit : Carole Musialek

Dans le territoire du Yukon, la communauté francophone est non seulement visible, mais aussi reconnue, dynamique et artistiquement riche d’après Isabelle Salesse, directrice générale de l’Association franco-yukonnaise (AFY).

Au Nunavut, ce sont la diversité et le dynamisme qui caractérisent le mieux une communauté hétéroclite, d’après Christian Ouaka, directeur général de l’Association des francophones du Nunavut (AFN).

Un lieu de rassemblement : un défi pour certains territoires

Inauguré en 1989, le Franco-Centre d’Iqaluit a été acheté à la fin des années 1980. Ancienne baraque de l’armée américaine datant de la Seconde Guerre mondiale, elle est utilisée aujourd’hui comme lieu de rassemblement communautaire.

Cependant, cette infrastructure vieillissante ne répond plus aux besoins de la communauté qui est en pleine croissance, et un projet de construction d’un nouveau centre en est à ses prémices. Des demandes de financement, auprès du gouvernement fédéral, ont été déposées depuis plusieurs années afin de faire progresser le projet d’une Maison de la francophonie.

Ce bâtiment aurait pour vocation de réunir les services de l’AFN, des services communautaires. Une salle communautaire permettrait aussi des rassemblements et des activités sociales qui sont de grande utilité aujourd’hui, selon Christian Ouaka. Mais l’appui des différentes instances gouvernementales demeure fondamental.

« L’AFN est un organisme à but non lucratif. Nous n’avons pas les finances nécessaires pour aller de l’avant avec un tel projet par nous-mêmes. Nous avons besoin de l’appui du gouvernement fédéral et territorial. »

— Christian Ouaka, directeur général de l'AFN

Dans les TNO, aucun centre communautaire n’a encore vu le jour, mais cela n’a pas empêché les francophones de se réunir dès 1978, année de la création de l’Association culturelle franco-ténoise, rappelle Mme Fournier. « Je pense que la communauté francophone s’est rassemblée, mobilisée à maintes reprises depuis plus d’une trentaine d’années », développe-t-elle.

L’idée d’un lieu de rassemblement ne date pas d’hier. Une demande de financement a de nouveau été déposée auprès de Patrimoine canadien à l’automne 2024 et des sessions de travail avec des consultants sont toujours en cours. « Ça fait extrêmement longtemps que c’est sur la table et ça l’est encore aujourd’hui », rappelle la directrice de la FFT.

Depuis que le nouveau gouvernement fédéral a été formé le 13 mai 2025, la FFT sonde les différents financements possibles pour un projet de cette envergure. La pérennité et la question de l’entretien d’une telle structure sont aussi au cœur de l’élaboration de ce projet, car, selon Mme Fournier, il faut être innovant dans les façons de penser.

Le Centre de la francophonie : un pilier au Yukon

Le Centre de la francophonie, tel qu’il est connu aujourd’hui, a été construit à Whitehorse, au début des années 2000. Véritable guichet unique et d’accueil pour les nouveaux arrivants au Yukon, le centre reflète « la volonté d’avoir (dans un lieu unique) les services en français et les services communautaires ». Plusieurs organismes francophones comme le journal L’Aurore boréale ou le Partenariat Communauté en Santé bénéficient aussi de bureaux dans le bâtiment.

« L’idée de départ, c’était vraiment d’avoir un guichet unique francophone. Et c’était aussi au moment où on commençait à voir se développer des services en développement économique, en formation. On avait besoin de plus d’espace »

— Isabelle Salesse, directrice générale de l'AFY

Rester vigilant

Force est de constater que des avancées majeures ont été obtenues par et pour les francophones en situation minoritaire dans les trois territoires. Cependant la vigilance reste de mise d’après Mme Salesse. Les minorités font toujours les frais de coupes budgétaires, en particulier dans le domaine de l’éducation. « Il y a quand même une épée de Damoclès qui est en permanence au-dessus de la tête de la communauté francophone. Il faut donc rester tout le temps vigilant. Malgré les lois et les volontés politiques, il suffit qu’il y ait un nouveau gouvernement avec de nouvelles priorités pour que les avancées et acquis des francophones soient remis en question », explique la directrice de l’AFY.

Alors que le danger d’assimilation est très présent, Audrey Fournier pense que les droits des minorités ne sont jamais véritablement acquis, car ils seront souvent remis en question d’une façon générale. « Il faut qu’on soit proactif et que l’on identifie où sont les risques pour essayer de les mitiger. Il faut aussi faire la promotion de ce que la communauté francophone apporte au Canada de façon générale, mais également dans nos régions. »

Que peut-on espérer pour les francophones dans le futur ?

Christian Ouaka espère que la croissance de la communauté francophone au Nunavut va se poursuivre. Il souhaite également que les infrastructures nécessaires à une telle suivront aussi.

« Je souhaite que la communauté continue d’être résiliente et que sa croissance soit suivie de l’écosystème nécessaire pour qu’elle soit soutenue. »

Même son de cloche au Yukon. Mme Salesse souhaite que la communauté franco-yukonaise continue de s’épanouir dans un environnement où la mise en œuvre de la Loi sur les services en français est pleine et entière en matière de santé et d’éducation. « Je souhaite aussi que nos personnes ainées puissent vivre leur retraite au Yukon dans la langue de Molière, » précise-t-elle le sourire aux lèvres.

Enfin, Mme Fournier espère qu’un centre communautaire franco-ténois verra le jour prochainement. « Je pense que c’est vraiment important, c’est le cœur d’une communauté d’avoir la capacité d’organiser des repas communautaires ensemble, juste se rassembler quand ça nous tente, de la façon que ça nous tente aussi. Je souhaite aussi que les droits des francophones continuent d’être reconnus, puisque les différents paliers de gouvernement mettent la Loi sur les langues officielles en œuvre, » conclut-elle.

Articles de l’Arctique est une collaboration des cinq médias francophones des trois territoires canadiens : les journaux L’Aquilon, L’Aurore boréale et Le Nunavoix, ainsi que les radios CFRT et Radio Taïga.

La francophonie comme levier économique : c’est autour de cette idée que les ministres responsables de la francophonie canadienne se sont rassemblés à Yellowknife les 26 et 27 juin. Bilinguisme, immigration, main-d’œuvre et éducation ont dominé les discussions de cette rencontre annuelle, que Steven Guilbeault, ministre fédéral des Langues officielles, a qualifiée de « très, très productive ».

L’hôtel Explorer a accueilli deux jours d’échanges entre ministres. La ministre de l’Éducation, de la Culture et de l’Emploi des TNO, Caitlin Cleveland, a estimé que ces discussions ont permis « d’améliorer la collaboration intergouvernementale visant à répondre aux enjeux prioritaires de la francophonie canadienne, notamment en ce qui a trait au développement économique et au soutien à apporter aux collectivités ».

Le français, un levier économique

Prenant la parole en conférence de presse, Steven Guilbeault a mis de l’avant les bénéfices du bilinguisme. Selon lui, « le bilinguisme ouvre les portes entre les provinces » et constitue aussi un avantage sur la scène internationale. « Le français est parlé dans plus de 100 pays, ce qui représente à peu près 322 millions de francophones », a-t-il rappelé, citant que cela représente « 20 % du commerce mondial ».

Durant la rencontre, les ministres ont aussi abordé le développement des marchés pour les entreprises francophones, la découvrabilité des contenus en ligne, les communications d’urgence en français, ainsi que la rétention des compétences linguistiques chez les jeunes.

Le projet Culture d’entreprise a été mis en avant comme un moyen de soutenir l’intégration des immigrants francophones en milieu de travail.

« Ce sont des succès collectifs qui nous permettent de bâtir une francophonie encore plus forte. »

— Steven Guilbeault, ministre fédéral des Langues officielles

Des engagements discutés

Steven Guilbeault a profité de la tribune pour rappeler les réalisations du gouvernement : « Dans la dernière année, il y a eu des avancées importantes », a-t-il dit, mentionnant les ententes signées avec toutes les provinces et tous les territoires pour améliorer les services en langue minoritaire. « C’est 120 millions de dollars sur cinq ans, plus 20 millions d’initiatives ponctuelles », a-t-il précisé.

Il a aussi cité le protocole d’entente ratifié pour l’enseignement dans la langue de la minorité, représentant « des investissements de 1,4 milliard de dollars », ainsi que les résultats positifs en matière d’immigration francophone hors Québec, « dépassés pour une troisième année consécutive ».

 Appel à l’unité 

« Ce sont des succès collectifs qui nous permettent de bâtir une francophonie encore plus forte, a résumé le ministre. Maintenant, plus que jamais, nous devons être unis. »

Le CMFC s’est engagé à renforcer la collaboration entre les différents niveaux de gouvernement afin de mieux soutenir les communautés francophones du pays. La prochaine rencontre annuelle aura lieu à Winnipeg, au Manitoba, en 2026.

 

De retour à un portefeuille qu’il connait en partie pour avoir été ministre du Patrimoine canadien de novembre 2019 à octobre 2021, Steven Guilbeault a ensuite été ministre de l’Environnement et du Changement climatique de 2021 à 2024 sous Justin Trudeau. Désormais ministre de l’Identité et de la Culture canadiennes et responsable des Langues officielles, il se dit « en apprentissage », mais promet d’agir rapidement.

Comment vivez-vous le passage de l’Environnement à la Culture et aux Langues officielles ?

Vous vous rappellerez probablement que lorsque j’ai été élu député la première fois en 2019, j’étais ministre de Patrimoine canadien [le ministère relève aujourd’hui du portefeuille intitulé « Identité et Culture canadiennes », NDLR], donc les arts, la culture, les langues autochtones; mais je n’avais pas les Langues officielles. Il y a une partie du portefeuille que je connais et que j’apprécie beaucoup pour l’avoir fait une première fois pendant deux ans. C’est vrai que les Langues officielles, c’est nouveau pour moi. Alors, j’apprends encore beaucoup et cette rencontre [des ministres de la francophonie, NDLR] à Yellowknife était très intéressante de ce point de vue-là, à la fois pour rencontrer mes homologues des provinces, des territoires, les intervenants et intervenantes, mais aussi pour me familiariser de plus en plus avec le dossier.

Quand Mark Carney a formé son premier Cabinet, aucun portefeuille ne portait officiellement le titre de Langues officielles, ce qui a semé la confusion chez plusieurs francophones. Est-ce que cela témoigne d’un manque de considération pour les langues officielles et la francophonie en situation minoritaire, selon vous ?

Non, je ne crois pas. Évidemment, j’avais la responsabilité des Langues officielles, mais je n’avais pas eu de titre [M. Guilbeault était alors ministre de la Culture et de l’Identité canadiennes, Parcs Canada, NDRL]. Ça a été corrigé en quelques semaines. C’est vrai que les titres sont des symboles importants, mais ce qui est important, c’est ce qu’on fait.

Et notre gouvernement [sous Justin Trudeau, NDLR] en a fait plus pour la modernisation de la loi et les langues officielles que n’importe quel autre, avec des investissements dans le Plan d’action historiques, qui vont atteindre 4,1 milliards au cours des prochaines années, et avec l’atteinte des cibles d’immigration francophones hors Québec. On n’avait jamais réussi à atteindre 4 % et on a dépassé 6 % et on veut se rendre à 12 %. Ça, ça compte. Je pense que ça démontre notre engagement profond envers la francophonie partout au pays.

Trois règlements censés mettre en œuvre la nouvelle Loi sur les langues officielles sont encore en attente. Le plus attendu devrait inclure des clauses linguistiques dans les ententes entre le fédéral et les provinces et territoires. En tant que ministre, comment pouvez-vous garantir que ce type de clause figurera bien dans les règlements?

Beaucoup de gens attendent les règlements avec impatience et je tiens à [les] rassurer : ça ne va pas trainer encore très longtemps. Il faut dire qu’entre la prorogation du Parlement, la course à la chefferie du Parti [libéral, NDLR], le fait d’avoir un nouveau chef; toutes ces choses-là ont ralenti le déploiement de ces règlements-là. Nous avions une très courte période parlementaire pour pouvoir déposer ça, mais au retour [du Parlement, en septembre, NDLR], c’est un sujet sur lequel je vais avancer rapidement.

Allez-vous les déposer avant Noël ?

Oui, absolument.

Est-ce que tous les règlements seront déposés ou allez-vous en prioriser ?

Chaque dépôt de règlement s’accompagne d’une période de consultation de 30 jours. Si on les dépose tous les trois en même temps, ça veut dire une période de consultation de 30 jours, si on les dépose les uns à la suite de l’autre, ça veut dire quatre semaines de consultation [à chaque fois, NDLR]. Moi, j’ai entendu des intervenants dire : « On voudrait avoir plus de temps de consultation », et d’autres : « Non, déposez-les tous en même temps, on veut toutes les voir. » Alors, on va continuer de discuter avec le milieu francophone au cours de l’été et d’essayer de trouver la meilleure façon de faire ça.

Le dernier rapport du commissaire aux langues officielles souligne que le Conseil du Trésor n’a jamais pleinement appliqué les recommandations visant à faire respecter les obligations en matière de langues officielles de dix 10 institutions fédérales. Comment travaillez-vous avec le Conseil pour vous assurer que ces exigences sont respectées ?

Nous sommes en discussion avec le Conseil du Trésor pour nous assurer que les lacunes qui ont été identifiées par le passé par le commissaire et par les intervenants soient corrigées dans la nouvelle mesure. C’est certainement notre intention.

Sur l’éducation, il y a des enfants francophones qui font cours dans des salles de classe préfabriquées, notamment en Colombie-Britannique. Comment le gouvernement fédéral peut-il faire en sorte d’éviter de telles situations ?

Vous soulignez un problème qui est important, mais qui ne concerne pas seulement les élèves qui sont dans les cours de français ou dans les communautés francophones en situation minoritaire. Dans les écoles francophones au Québec, il y a beaucoup d’enfants qui sont dans des classes préfabriquées, il y a des manques d’espace. Alors, il y a des besoins d’investissement important dans le secteur de l’éducation. Est-ce que le gouvernement fédéral peut faire mieux en matière d’entente fédérale, provinciale, territoriale pour s’assurer que les fonds qui sont destinés à certaines choses aillent vraiment là où les ententes le prévoient? Je pense que oui. Si vous regardez le renouvèlement de l’entente sur la santé par exemple, que le gouvernement précédent a fait, il y a eu des exigences sur la nécessité de communiquer un certain nombre d’informations sur l’utilisation des fonds. Je pense que par le passé, ça ne se faisait pas toujours. On va devoir être plus vigilants sur cette question-là.

 Les propos ont été réorganisés pour des raisons de longueur et de clarté.

20 juin 2025

Les bénévoles, petites mains de l’ombre mais rouages essentiels pour la réussite d’une telle organisation !

Terry Uyarak et ses douces notes de guitare pour un moment détente au Black Heart, vendredi après-midi. Avant la cérémonie d’ouverture qui s’est tenue vendredi soir et durant toute la fin de semaine, d’autres concerts étaient organisés dans des lieux plus intimistes comme ici au Black Heart, ou plus atypiques comme le centre aquatique et le pavillon Sylvia Grinnell. 

Le légendaire groupe de rock Northern Haze, originaire d’Igloolik, a embarqué la foule dans un grand moment de communion lors de la cérémonie d’ouverture.

Charlotte Qamaniq (gauche) et Cynthia Pitsiulak (droite) composent le duo Silla. Les deux artistes originaires d’Igloolik et Kimmirut ont produit une envoutante performance de chants de gorge traditionnels.

Le groupe de reggae groenlandais Sauwestari a également levé la foule présente en nombre sous le chapiteau, en clôture de la cérémonie d’ouverture.

21 juin 2025

Le premier ministre P.J. Akeeagok remet la médaille du couronnement du roi Charles III à la cinéaste Alethea Arnaquq-Baril, dont la société de production Unikkaat Studios a notamment produit le film « The Grizzlies ». Deux autres personnes ont été décorées : Stacey Aglok MacDonlad, la réalisatrice de North of North Stacey Aglok MacDonlad, et Matthew Nuqingaq, réputé pour sa création de bijoux. 

La chanteuse Niivi Smowball, originaire du Nunavik, s’est produite pour la première fois à Iqaluit. Un rock palpitant, engagé à l’image du single « No Pride in Genocide », et particulièrement puissant.

Les deux amies Varna GL et Nancy Mike, qui ont notamment joué comme actrices dans la troisième saison de True Detective et produit des titres de la bande son, ont offert une splendide collaboration samedi soir sur la scène Tupiq. Entre chants de gorge, danses et rythmes électroniques : un voyage musical exceptionnel.

22 juin 2025

En raison des mauvaises conditions météo, les célébrations pour la Journée nationale des peuples autochtones ont été reportées au lendemain, lors du dernier jour du festival. Un grand banquet communautaire était organisé par la Ville d’Iqaluit et le Festival Alianait, et concocté par le centre Qajuqturvik. Deux phoques ont également été préparés et partagés sur place, avant un concours de jeux inuit. Plus de 600 couverts ont été distribués !

Le spectacle de l’incontournable troupe Artcirq a été le point d’orgue du spectacle de clôture dimanche soir. 

Emblème de cette 21e édition, le Qilaut a été bien mis en valeur avec une belle exhibition de danse du tambour menée par Trisha et Karen de Qilaut Project, avant de refermer la page de cette édition 2025 avec Accordion Orchestra. 

Quelles sont les chances qu’un événement à l’horaire du Toonyk Tyme soit à l’heure? Ou qu’il ait seulement lieu? Est-ce que l’autobus public circulera un jour sur une route d’Apex fraîchement asphaltée? Vais-je pouvoir regarder mes enfants qui descendent la glissade jaune pendant que je marine dans le jacuzzi du centre aquatique? Et le pont piétonnier au-dessus de la rivière Sylvia Grinnell, sur pause depuis 20 ans ? La mécanique du nord, explication universelle aux tracas quotidiens, a le dos large. Tout est plus compliqué, long et hasardeux dans notre contrée. Il y a pourtant plusieurs beaux succès et dans la courte liste de ce qui fonctionne bien, année après année, il faut se rendre à l’évidence, le festival Alianait tient le haut du pavé !

Une quarantaine de bénévoles efficaces, serviables et souriants, une sono impeccable, des jeux de lumières variés, une foule enthousiaste, des artistes généreux vraiment contents d’être là, bref, si on exclut la météo tristounette, quand les seuls bémols recueillis concernent le prix des t-shirts et un spectacle devancé, on peut parler d’une réussite.

À l’entrée du chapiteau Tupiq, une vente de souvenirs et divers accessoires était tenue par des bénévoles.

Crédit : Brice Ivanovic

La base : de bons artistes

Un festival musical vie et meurt avec sa programmation. Il faut un bon mélange des genres. Des artistes chevronnés, des jeunes loups qui débutent, des classiques à chanter en groupe, des nouveautés à découvrir, et à ce sens, la soirée du samedi, sous la tente de Nakasuk, avait tout pour combler les mélomanes qui ont été nombreux à répondre à l’appel.

Kathy Aputiarjuk eu l’honneur d’ouvrir la veillé avec son folk intimiste et personnel. Une voix cristalline qui porte et un jeu de guitare tout en douceur, la jeune musicienne de Kangiqsualujjuaq au Nunavik s’est fort bien acquittée de sa case horaire ingrate. En effet, à l’heure où les gens arrivent, s’installent, se retrouvent, discutent, il est parfois difficile d’imposer ses chansons. Pourtant, c’est dans un grand respect que la foule s’est jointe à l’artiste visiblement heureuse des réactions et applaudissements. La table était mise pour une belle soirée.

Kathy Aputiarjuk a ouvert le concert du samedi soir.

Crédit : Alianait - JS Photographie

On branche les instruments

Le groupe rock Nivii, au look néo-gothique et à l’attitude punk, enchaîna prouvant que les genres se mélangent bien quand l’auditoire est curieux et réceptif. Cris stridents, guitare lourde et rythmique énergique, les textes adolescents ou plus introspectifs ont fait mouche et les spectateurs de tous âges ont bien retourné l’énergie vers la scène au grand plaisir de Niivi Snowball, leader du quatuor de Kuujjuaq.

Niivi Snowball a enflammé la tente Tupiq avec une énergie débordante.

Crédit : Brice Ivanovic

L’électro s’invite

Varna, artiste multidisciplinaire originaire du Groenland, accompagnée de l’énergique Nancy Mike, habituée du festival et gloire locale, a su réconcilier le passé et le présent. Elles ont transporté le public dans un univers où l’électro côtoie les chants de gorges, où les tambours traditionnels s’échantillonnent sur des musiques aériennes, où la danse se fond dans des projections psychédéliques, bref, les performances de la soirée se suivaient en qualité comme en diversité des sons. L’apparition d’un danseur très théâtral, qui parcouru le public hilare pendant de longues minutes, a clôt le spectacle et soulevé la foule qui en redemandait.

Varna GL et Nancy Mike ont allié tradition et modernité pour une performance de haute volée.

Crédit : Brice Ivanovic

Le clou du spectacle : un hommage aux géants

En ce jour d’ullotuneq, fête nationale groenlandaise, il était inespéré de voir fouler les planches de la grande scène Tupiq par Malik Høegh, leader original du premier groupe rock de l’île : Sumé. Dire qu’ils étaient attendu est un euphémisme. Ceux qui ont remué les fibres d’émancipation culturelle et d’engagement nationaliste des groenlandais dès 1973 avec leur premier album Sumut, un immense succès commercial local qui a traversé le temps, ont été accueilli comme il se doit en véritables rock stars.

Il s’agissait d’un hommage, certes, mais avec le chanteur original aux commandes d’un sextuor de professionnels bien rodé et en pleine forme, on peut affirmer sans crainte que cette version du groupe a rendu justice aux chansons cinquantenaires des pionniers du rock progressif de l’île.

Accompagné d’une projection d’extraits de leur film biographique Sumé: the sound of a revolution, sorti en 2014 et présenté deux jours plus tôt au cinéma Astro avec des musiciens live, ils ont su rapidement mettre la foule dans leur petite poche en attaquant leurs classiques engagés repris en chœur.

Un groupe d’une telle importance qui s’est séparé en 1977 et qui ne passe jamais au Canada, les spectateurs se sentaient privilégiés avec raison. Une soirée historique ? Plusieurs ont osé le dire! C’est pour ces moments qu’Alianait travaille fort toute l’année. Ils méritent certainement l’émulation pour leur capacité à fonctionner avec la mécanique du nord !