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le Mercredi 11 octobre 2023 17:19 | mis à jour le 8 mars 2024 17:21 Société

Tr’ondëk-Klondike devient le vingt-et-unième site canadien du patrimoine mondial de l’UNESCO

Debbie Nagano, directrice du patrimoine pour le gouvernement Tr’ondëk Hwëch’in, a reçu les présents offerts par le ministre du tourisme du Yukon John Streicker à la fin de la cérémonie de nomination de Tr’ondëk-Klondike. L’événement a eu lieu au centre culturel Danojà Zho, suivi d’une réception au théâtre Palace Grand de Dawson — Crédit : Agnès Viger
Debbie Nagano, directrice du patrimoine pour le gouvernement Tr’ondëk Hwëch’in, a reçu les présents offerts par le ministre du tourisme du Yukon John Streicker à la fin de la cérémonie de nomination de Tr’ondëk-Klondike. L’événement a eu lieu au centre culturel Danojà Zho, suivi d’une réception au théâtre Palace Grand de Dawson
Crédit : Agnès Viger
Ce 17 septembre 2023, lors de la 45e session du Comité du patrimoine mondial à Ryad en Arabie Saoudite, Tr’ondëk-Klondike a rejoint la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO, reconnaissant les biens culturels et naturels présentant un intérêt exceptionnel pour l’humanité.
Tr’ondëk-Klondike devient le vingt-et-unième site canadien du patrimoine mondial de l’UNESCO
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Une prière a ouvert la cérémonie d’ouverture de nomination de Tr’ondëk-Klondike.

Crédit : Agnès Viger

Deux décennies après la création du comité consultatif communautaire pour ce projet, l’inscription sur liste indicative du patrimoine mondial du Canada en 2004, la soumission officielle d’une candidature en 2017, son retrait en 2018 et une nouvelle soumission au printemps 2021, l’annonce a été accueillie avec fierté par les membres de la communauté.

 

Tr’ondëk-Klondike est présenté comme une région subarctique du Nord-Ouest du Canada, le long du fleuve Yukon, sur le territoire des Tr’ondëk Hwëch’in. La région comprend huit sites reflétant les expériences et capacités d’adaptation des peuples autochtones suite aux changements drastiques causés par la ruée vers l’or du Klondike, montrant divers aspects de la colonisation sur la région.

 

« Nous, citoyens Tr’ondëk Hwëch’in, sommes fiers d’avoir joué un rôle de premier plan dans le processus de nomination, un processus collectif qui a rapproché notre communauté. Je tiens à exprimer ma gratitude aux aîné·e·s qui ont partagé leurs connaissances et leurs histoires, et aux membres de la communauté qui ont maintenu cette idée en vie pendant des décennies », partage Debbie Nagano, co-présidente du comité consultatif et directrice du patrimoine pour le gouvernement Tr’ondëk Hwëch’in.

Le chef des Tr’ondëk Hwëch’in, Darren Taylor, a partagé son enthousiasme suite à la nomination.

Crédit : Gouvernement Tr'ondëk Hwëch'in

Reconnaître l’impact du colonialisme

 

Le colonialisme de l’Amérique du Nord fait partie intégrante de l’histoire du Canada, et son impact n’est pas toujours reconnu.

 

« Avec la nomination de Tr’ondëk-Klondike, nous avons entrepris une tâche difficile étant donné la complexité de l’exploration d’un thème aussi vaste et complexe que le colonialisme, en particulier du point de vue de l’impact et de la réponse des peuples autochtones. Le choix de cette perspective a été possible grâce à un engagement et un dévouement de longue date de la part des Tr’ondëk Hwëch’in, pour sensibiliser à leur culture et à leur histoire », a reconnu Luisa de Marco, représentante de l’ICOMOS – conseil international des monuments et des sites – lors de la nomination de Tr’ondëk-Klondike à Ryad.

 

Les sites historiques du Klondike « contiennent des ressources archéologiques et historiques qui témoignent de l’expérience et de la résilience durable des Tr’ondëk Hwëch’in face à un événement colonial caractérisé par l’établissement et la consolidation aveugles du pouvoir colonial. Cela fait écho à la Commission de vérité et de réconciliation et s’inscrit dans les initiatives visant à s’éloigner de l’histoire timide et de la version blanchie du passé », rappelle Travis Weber, surintendant des sites historiques du Klondike à la soumission de la nomination.

 

Tr’ondëk-Klondike pourrait servir de modèle pour la nomination d’autres patrimoines mondiaux. « C’est un exemple de l’expérience globale du colonialisme, que nous partageons avec de nombreux autochtones dans le monde entier. C’est un témoignage d’une force significative, de luttes et de la culture durable du peuple Tr’ondëk Hwëch’in. Nous nous réjouissons de poursuivre et de partager ces histoires et ces récits importants sur notre terre, des récits porteurs d’universalisme », partage Darren Taylor, chef des Tr’ondëk Hwëch’in.

 

« Les peuples autochtones gèrent la terre et l’eau de cette région depuis des temps immémoriaux et ont vécu l’occupation rapide et dramatique de la colonisation nord-américaine au cours du XIXe siècle. L’inscription de ce bien sur la liste du patrimoine mondial est un témoignage authentique de cette expérience », ajoute Natasha Power Cayer, ambassadrice et déléguée permanente du Canada auprès de l’UNESCO.

Debbie Nagano devant le Ë`dhä` Dä`dhë`cha, le glissement de terrain Moosehide Slide faisant partie des sites culturels désignés à Dawson.

Crédit : Gouvernement Tr'ondëk Hwëch'in

Parler du passé et protéger l’avenir

 

Les huit sites d’intérêt de Tr’ondëk-Klondike ont été divisés en 3 catégories : la vie avant la colonisation (avec le camp de pêche Tr’ochëk, le Moosehide Slide à Dawson); la modification des moyens de subsistance, adaptation nouvelles économies et nouvelle spiritualité (village Moosehide, Black City et premiers comptoirs d’échanges commerciaux avec Fort Reliance ainsi que Forty Mile et son cimetière); et la consolidation des structures d’imposition de nouvel ordre social et de domination écrasante de culture colonialiste (site historique de Dawson, Fort Constantine, Fort Cudahy) qui ont entraîné résilience et adaptabilité chez les Tr’ondëk Hwëch’in, malgré les impacts sociaux, les dépossessions, la dégradation de l’environnement et la marginalisation raciale, spirituelle et culturelle.

 

« Lorsque de nouveaux arrivants sont venus sur nos terres à la recherche d’or, notre peuple a compris qu’un énorme changement se préparait », rappelle Darren Taylor. Les villages de Moosehide et de Black City ont ainsi été des refuges temporaires, afin de préserver culture et traditions, tout en favorisant la prospérité économique. « Nous avons aussi aidé les nouveaux venus à survivre, leur avons appris à vivre ici d’une bonne manière, selon notre mode de vie », ajoute-t-il.

 

Aujourd’hui, partager l’histoire et avancer vers la réconciliation est au cœur des préoccupations de la communauté. « Nous avons été les gardiens actifs de ces eaux et de ces terres et nous continuons à parler en leur nom. Nous tenons compte de l’interdépendance de toutes les choses lorsque nous prenons des décisions pour nos proches, les animaux, les poissons et les oiseaux. Tel est notre mode de vie », rappelle Darren Taylor.

 

« Les sites du patrimoine mondial de Tr’ondëk-Klondike s’inscrivent dans la continuité de ce travail en honorant notre histoire et notre avenir, et en respectant l’esprit de réconciliation », ajoute-t-il. « Cette inscription reflète le travail de nos ancêtres qui ont pris soin de cette terre avant nous et se tourne également vers la génération future qui héritera de ces terres et honorera la relation secrète avec la terre elle-même, une relation qui existe depuis la nuit des temps », conclut Debbie Nagano.