Des centaines de leaders, experts, membres de la communauté et jeunes étaient réunis à l’hôtel Aqsarniit à l’occasion de l’événement annuel afin d’explorer et de définir une vision unifiée de la souveraineté du Nunavut dans l’Arctique ancrée dans les valeurs, les priorités et les réalités vécues par les Nunavummiut.
Alors que les discussions de la première journée se sont concentrées sur des thèmes tels que l’autodétermination et l’adaptation au climat, ce sont les besoins concernant les infrastructures sur le territoire qui ont retenu l’attention le lendemain.
Pour le premier ministre du Nunavut, P.J. Akeeagok, la souveraineté et la sécurité dans l’Arctique ne peuvent être atteintes sans reconnaître les Inuit comme des partenaires à part entière et égaux dans la prise de décisions, le développement et la défense.
Des discours rassembleurs
Lors du discours d’ouverture, Jeremy Tunraluk, président de Nunavut Tunngavik Inc. à plaidé pour un meilleur investissement dans les communautés notamment en termes de routes, de communications, de pistes d’atterrissage et de logements.
« Que ce rassemblement en soit un d’actions, pas seulement de paroles. Engageons-nous à construire des maisons, à protéger notre langue et nos eaux et à donner à nos jeunes les moyens d’agir pour les Inuit, par les Inuit, au Nunavut, pour toujours. »
Le lendemain, c’était au tour de P.J. Akeeagok de débuter la journée : « Alors que d’autres regardent l’Arctique et voient un potentiel inexploité ou un levier géopolitique, nous voyons autre chose : un chez-soi… » puis d’ajouter :
« Aujourd’hui, nous ne sommes pas des témoins passifs de la politique arctique : nous en sommes les architectes. »
Des menaces sans précédent
Le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS), qui avait des délégués présents au sommet, déclare que les gouvernements territoriaux et provinciaux, les administrations locales, ainsi que les organisations autochtones du Nord canadien, sont confrontés à un contexte de menaces d’une une ampleur sans précédent.
Magali Hébert des relations avec les médias pour le SCRS explique que celles-ci découlent non seulement des capacités militaires des concurrents stratégiques et des effets des changements climatiques, mais aussi, de plus en plus, de l’espionnage, d’activités d’ingérence étrangère et d’interventions économiques illicites.
Les réserves non exploitées d’hydrocarbures, les stocks de pêche, les financements et collaborations dans le domaine de la recherche dans l’Arctique et le Nord canadien et les nouvelles technologies maritimes et sous-marines attirent selon elle les investissements étrangers, ce qui pourrait menacer les intérêts régionaux.
Outre la préoccupation militaire historique que constitue la Russie pour l’Arctique, elle mentionne l’attention accrue de la République populaire de Chine qui s’est déclarée « grande puissance polaire ».
Stephen Harper, qui était présent pour une discussion informelle avec Udlariak Hanson, vice-présidente de la société minière Baffinland, croit que ces menaces représentent une occasion de faire prospérer la région.
L’ancien premier ministre du Canada de 2006 à 2015 y est allé d’une déclaration marquante en qualifiant la croissance de l’Arctique canadien d’« épouvantable ».
Il a énoncé que par rapport à la plupart des autres pays de l’Arctique, le Canada propose un bilan lamentable en matière de développement des infrastructures et estime que la meilleure façon d’améliorer cette lacune est de dépenser de l’argent dans le domaine militaire.
« C’est le moyen le plus important et le plus efficace de créer l’infrastructure la plus fondamentale et le plus vaste ».

L’ancien premier ministre du Canada Stephen Harper a qualifié le développement de l’Arctique canadien d’« épouvantable ».
P.J. Akeeagok est d’avis que quatre projets d’infrastructure d’édification du pays dirigés par des Inuit doivent présentement être traités en tant que priorités nationales pressantes, et non comme des aspirations futures. « Ces projets permettront non seulement de répondre aux besoins urgents des collectivités, mais aussi d’accroître la souveraineté du Canada dans l’Arctique ».
Il s’agit du port en eau profonde de Qikiqtarjuaq, du projet hydroélectrique d’Iqaluit, de la liaison hydroélectrique et fibre optique de Kivalliq ainsi que la route et le port de Grays Bay.
Le changement climatique fragilise l’Arctique
Un thème majeur qui a émergé du Sommet est l’adaptation au changement climatique et les impacts environnementaux.
Magali Hébert déclare que la fonte des glaces entraînera probablement une présence accrue d’acteurs arctiques et non arctiques dans les régions nordiques, puisqu’elle ouvrira la voie à l’utilisation d’autres routes de navigation intéressantes et à l’exploitation de gisements de minéraux.
« Le dégel du pergélisol pourrait menacer l’intégrité des infrastructures en place et poser des défis pour la construction de nouvelles structures ».
Pour faire face au phénomène, P.J. Akeeagok demande notamment la poursuite et l’augmentation des investissements dans la gérance de l’environnement conduite par les Inuit, un soutien urgent aux transitions vers l’énergie propre ainsi que des infrastructures résilientes aux impacts climatiques qui permettent aux Inuit de rester sur le territoire de manière durable.
« Protéger l’Arctique, c’est donner du pouvoir aux gens qui y vivent. L’action climatique doit être axée sur la communauté, ancrée dans la culture et enracinée en partenariat avec les dirigeants du Nunavut ».