le Jeudi 12 juin 2025
le Mercredi 11 juin 2025 8:00 Communauté

Éducation bilingue : une mise en œuvre jugée incohérente

Plus de 120 groupes de discussion qui ont permis d’entendre des éducateurs, des parents, des élèves, des aînés et des membres du ministère de l’Éducation du Nunavut ont été réalisés en 2023-2024. — Fournie par la CASDN
Plus de 120 groupes de discussion qui ont permis d’entendre des éducateurs, des parents, des élèves, des aînés et des membres du ministère de l’Éducation du Nunavut ont été réalisés en 2023-2024.
Fournie par la CASDN
La Coalition des administrations scolaires de district du Nunavut (CASDN) a récemment dévoilé son rapport 2025 « Des promesses à la réalisation : les voix inuit dans l’éducation bilingue » qui présente l’état de la langue d’enseignement dans les écoles du Nunavut. Le document dévoile la nécessité d’agir maintenant pour mettre en œuvre un système d’éducation bilingue qui respecte les droits linguistiques des élèves inuit.
Éducation bilingue : une mise en œuvre jugée incohérente
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En 2023-2024, la CASDN a visité 24 communautés et organisé plus de 120 groupes de discussion pour entendre des éducateurs, des parents, des élèves, des aînés et des membres du ministère de l’Éducation au sujet de l’éducation bilingue au Nunavut.

Cette série de consultations représentait la première évaluation communautaire de la mise en œuvre du modèle linguistique à l’échelle du territoire depuis que les premières sélections de modèles ont été faites en 2012.

Un appel à l’action

Au Nunavut, trois modèles d’éducation bilingue sont proposés : « Qulliq », « Immersion » et « Dual ». Alors que le premier se concentre sur la promotion et le renforcement de l’inuktitut comme langue d’enseignement, le modèle d’immersion est plus adapté aux communautés où la langue inuit est en déclin et offre une immersion hâtive. Enfin, le modèle dual permet un enseignement bilingue plus équilibré.

« Ce que nous avons entendu était clair : les modèles existent, mais pas la mise en œuvre », peut-on lire dès les premières lignes du rapport. Une affirmation que corrobore Maya Jelali, directrice de recherche, des politiques et de l’évaluation du CASDN qui confirme que malgré les engagements législatifs, le modèle de langue d’enseignement n’est pas appliqué de façon uniforme, ce qui nuit à la transmission de la langue et à la réussite scolaire.

 « Ce que nous voulons mettre de l’avant en priorité est la mise en œuvre d’un plan stratégique pour le recrutement, la formation et le maintien en poste des enseignants inuit, accompagné de ressources pédagogiques de qualité en inuktut et une responsabilisation claire à tous les niveaux du système »

— Maya Jelali, directrice de recherche, des politiques et de l’évaluation du CASDN

Selon les conclusions du rapport, les éducateurs inuit font face à des obstacles considérables, notamment du matériel pédagogique limité et un soutien insuffisant, tandis que les éducateurs non inuit manquent souvent d’orientation culturelle.

Le document ne propose pas de nouveaux modèles, mais appelle plutôt à des actions significatives et à la responsabilisation pour mettre pleinement en œuvre les modèles d’éducation bilingue qui ont déjà été légiférés.

Maya Jelali indique que les priorités qui lui apparaissent comme étant le plus urgentes à traiter sont le recrutement stratégique d’enseignants inuit qualifiés, la création de programmes de certification accessibles et l’introduction d’un nouveau modèle de dotation pour assurer une représentation adéquate des enseignants de langue inuit dans chaque école. La mise en place immédiate d’incitatifs financiers et professionnels pour encourager la rétention des enseignants parlant la langue et le développement et la diffusion de ressources pédagogiques numériques et dialectales compte aussi parmi cette liste.

« Ces éléments sont essentiels pour enrayer le déclin de l’inuktut et assurer une mise en œuvre crédible et efficace du modèle d’éducation bilingue » affirme-t-elle.

Maya Jelali ajoute que les aînés peuvent et doivent jouer un rôle accru, à condition qu’ils soient soutenus, respectés et intégrés de manière intentionnelle dans les systèmes scolaires.

Malgré la présence de défis, la femme dénote néanmoins des points positifs dont la présence d’enseignants inuit dévoués, la mise en œuvre par certaines écoles de modèles d’enseignement en inuktut et la mobilisation des familles et des communautés pour préserver la langue et la culture.

La réponse du gouvernement

« Le gouvernement du Nunavut croit fermement que les enfants ont droit à l’éducation en inuktut et s’est engagé à élaborer le programme d’études et les ressources nécessaires pour un système d’éducation entièrement bilingue. Nous reconnaissons l’importance de la langue d’enseignement de l’inuktut pour améliorer les résultats scolaires de nos élèves », déclare Krista Amey, aux communications à la Division de l’engagement des parties prenantes au ministère de l’Éducation du Nunavut.

En réaction au rapport, le ministère de l’Éducation se dit conscient des problèmes qui y sont soulevés et espère que leurs récentes actions aideront à résoudre des lacunes. Parmi ces actions, Krista Amey souligne les révisions apportées au Règlement sur la langue d’enseignement, les initiatives visant à accroître le recrutement et le maintien en poste des éducateurs inuit, ainsi que le lancement récent du programme d’études de la maternelle à la 6e année au Nunavut.

Le ministère de l’Éducation s’engage aussi à fournir les outils et les ressources nécessaires pour soutenir les écoles et les éducateurs.

Elle ajoute que les efforts de recrutement et de maintien en poste se sont intensifiés au cours des dernières années, notamment en augmentant la publicité et en utilisant des salons de l’emploi.

« Nous manquons cruellement d’enseignants parlant l’inuktut. À mesure que nous augmenterons ce nombre, la mise en œuvre de la langue d’enseignement de l’inuktut augmentera ».