Dans un contexte de francophonie grandissante au Nunavut, les organismes francophones se sont envolés dans l’ouest du territoire du 28 au 30 juin dernier. Une première initiative du genre, très attendue par les locuteurs du français. Après des semaines de préparation et d’appel à rencontre dans la deuxième plus grande communauté du Nunavut (2000 habitants), Marie-France Talbot (Centre de formation Qaujimaniq), Samia Salomon (Femmes et égalité des genres) et Annie Laroque (Commission scolaire francophone du Nunavut) ont pu recueillir les attentes de ces francophones en milieu minoritaire, qui plus est dans des communautés éloignées de la capitale.
« Des défis supplémentaires »
Gestionnaire du Centre de formation, Marie-France Talbot s’est dit très agréablement surprise de l’accueil réservé par la quinzaine de francophones qui avait favorablement répondu à l’appel : « On sentait que c’était un moment attendu. Il y a beaucoup d’attentes, que ce soit en matière de services mais aussi de représentation. Ils nous avaient même préparé tout une liste de besoins et de volontés dans un tableau de trois pages ! ».
Dans ce tableau divisé en trois catégories (court, moyen et long terme), les francophones ont donc pu exprimer leurs priorités pour maintenir le français et s’épanouir dans la langue de Molière.
« Ils font face à des défis supplémentaires que nous à Iqaluit. Il n’y a pas de garderie francophone, pas d’école non plus. Les enfants évoluent dans un environnement anglophone toute la journée et c’est parfois difficile de reprendre la main en français à la maison »
Parmi ces priorités dressées, remontent notamment plus d’inclusion, des programmes d’insertion pour nouveaux arrivants francophones, l’extension des services francophones déjà présents à Iqaluit en matière d’éducation, de justice et de santé, ou encore le développement d’activités culturelles. « Ce sont des francophones qui ont déjà vécu à Iqaluit » contextualise la gestionnaire du Centre de formation, avant de poursuivre :
« Le mot d’ordre c’était : ne nous oubliez pas ! »

De nombreuses volontés ont été exprimées lors de ces rencontres.
Féminisme et égalité des genres : une volonté de s’organiser
Récemment déployé sur le territoire, le projet Femmes et égalité des genres porté par l’Association des francophones du Nunavut (AFN), et mené par Samia Salomon, a suscité un grand intérêt à l’ouest de la baie d’Hudson. « Les femmes rencontrées connaissaient déjà notre démarche. Il y a eu beaucoup d’intérêt, c’est la première fois qu’un groupe vient à leur rencontre » introduit la chargée de projet. Elle explique également que ces femmes francophones s’organisaient déjà entre elles pour des rencontres et des activités, mais de façon non officielle.
« Désormais, il y a cette volonté de se structurer, comme avoir un bureau ici à Rankin Inlet par exemple ou du soutien financier pour organiser des activités. »

: Marie-France Talbot (à gauche), Annie Laroque (au centre) et Samia Salomon (droite) espèrent pouvoir renouveler l’opération dans d’autres communautés.
Éducation en français : des possibilités explorées
Afin de sonder les divers besoins sur le plan de l’éducation, la formation et d’employabilité, les émissaires francophones ont également rencontré la Chambre des commerces de la région du Kivalik, l’organisme communautaire Ilitaqsiniq ainsi que le district d’éducation.
Directrice de la Commission scolaire francophone du Nunavut, Annie Laroque a échangé plusieurs familles pour évaluer les besoins sur le plan éducatif.
« L’objectif était de voir si elles étaient prêtes à recevoir une éducation francophone. Il y a un potentiel d’une quinzaine d’élèves. L’approche a vraiment été positive, les parents sont engagés et nous allons pouvoir travailler avec eux »
Parmi les pistes explorées par la Commission scolaire, Annie Laroque évoque la possibilité d’installer un enseignant francophone dans les écoles. Un modèle hybride est également mis en avant, avec la mise à disposition d’un éventuel local pour suivre des cours en ligne. « Le district a fait preuve d’une belle ouverture. Ils seraient gagnants sur le volet immersion, pour le français en seconde langue » se réjouit-elle, avant de conclure : « Il va falloir désormais voir avec le gouvernement du Nunavut pour obtenir les autorisations nécessaires ».